Le jury du prix Renaudot a récompensé, ce mercredi 03 novembre, Amélie Nothomb pour son roman "Premier sang" (Albin Michel). Et c'est Anthony Palou qui remporte le prix Renaudot essai pour "Dans ma rue y avait trois boutiques" (Les Presses de la Cité).
"Il ne faut pas sous-estimer la rage de survivre", écrit la romancière belge Amélie Nothomb dans son dernier roman Premier sang (Albin Michel), qui a obtenu le prix Renaudot 2021 ce mercredi 3 novembre 2021. L'autrice de best-sellers a été élue au deuxième tour, avec six voix contre deux pour Anne Berest et une voix pour Abel Quentin. Elle succède à Marie-Hélène Lafon pour Histoire du fils, paru chez Buchet-Chastel.
Dans ce 32e roman, la "Dame au chapeau" rend hommage à un père admiré, le diplomate belge Patrick Nothomb, décédé lors du premier confinement en mars 2020. "Donne à ton écriture le pouvoir de ressusciter ton père et de lui dire au revoir", se dit-elle alors. En se mettant dans sa peau, Amélie Nothomb lui emprunte ses mots et retrace ainsi la vie du père, depuis sa naissance dans un milieu aristocratique jusqu'à sa naissance à elle. Elle évoque les souvenirs d'un enfant marqué par la mort de son père et le désamour de sa mère, élevé par ses grands-parents maternels et séjournant de temps à autre chez son grand-père paternel, à la fois poète et despote. Amélie Nothomb raconte aussi la prise d'otages dans laquelle il faillit mourir, en 1964, à Stanleyville au Congo. "Les Nothomb étaient des fous furieux", glisse l'écrivaine.
Grand prix du roman de l'Académie française en 1999 pour Stupeur et Tremblements et Prix de Flore en 2007 pour Ni d'Eve, ni d'Adam, Amélie Nothomb n'avait pas été retenue dans la liste d'un grand prix depuis 2019, et sa sélection pour le prix Goncourt avec Soif. Qu'il s'agisse d'intrigue policière ou de contes féeriques, les livres d'Amélie Nothomb atteignent toujours des chiffres records de ventes, et sont traduits dans des dizaines de langues. Les ventes de Premier sang, paru le 18 août, ont déjà dépassé les 100 000 exemplaires, selon GFK, soit la meilleure vente parmi les romans de la rentrée.
Tête de gondole saisonnière, Amélie Nothomb défie ses détracteurs qui critiquent la qualité inégale d'une production abondante (une trentaine d'ouvrages depuis 1992). La romancière, aujourd'hui âgée de 55 ans, affirme achever entre trois et quatre romans par an, pour n'en publier qu'un seul. "J'’écris depuis que j’ai 17 ans, non pas du tout dans l’intention d’être écrivain, mais de façon maladive, parce que comment voulez-vous vivre sans écrire ?, confiait-elle sur France Culture, en 2019. C’est tellement difficile de vivre que, sans cette chose dont je n’ai toujours pas compris ce que c’était, sans écrire, la vie n’est juste pas possible."
Ce dernier roman est donc aussi le témoignage d'un deuil. Amélie Nothomb entretient par ailleurs depuis longtemps un rapport méditatif à la mort. Celui-ci s'exprime autant dans ses écrits que dans le récit d'elle-même qu'elle livre en entretien. Dans la série A Voix nue qui lui était consacrée sur France Culture en 2019, elle évoquait différents moments de sa vie où la mort s'est invitée :
"J'ai aussi une profonde expérience de la mort. Je suis née dans des circonstances assez spéciales, j'ai failli mourir pendant l'accouchement de ma mère qui était très difficile, je suis née par le siège, ma tête est restée à l'intérieur beaucoup trop longtemps, je suis née pâmée, je crois que c'est ce qui explique que pendant les deux premières années de ma vie je n'ai pas émis un son, j'étais ce qu'on appelle un tube... métaphysique des tubes. (...) Adolescente, j'ai fait une anorexie extrêmement grave dont j'ai failli mourir. Ce qui m'en a empêché, c'était de sentir que la mort arrivait, elle s'est manifestée par un froid incroyable qui prenait possession de moi. (...) Et là mon corps s'est séparé en deux, mon corps a trouvé la solution, mon corps a quitté mon âme et est allé mangé."
Le Renaudot essai 2021 décerné à Anthony Palou
Le Renaudot de l'essai a quant à lui été décerné à Anthony Palou pour Dans ma rue y avait trois boutiques, publié aux Presses de la Cité. En 2020, Dominique Fortier l'emportait avec ses Villes de Papiers, paru chez Grasset.
Critique de théâtre au journal Le Figaro, Anthony Palou livre avec cet essai un plaidoyer en faveur des commerces de proximité dont il décrit la disparition. Né dans le Finistère sud, à Quimper, au milieu des années 1960, le journaliste a grandi au sein d'une famille d'immigrés espagnols, propriétaires d'une petite échoppe de fruits et légumes au sein de la capitale cornouaillaise. Refusant de devenir un "pousseur de caddies", Anthony Palou veut dire "la poésie de cette France des boutiques".
Le Renaudot poche 2021 remis à Olivier Rony
Enfin, le Renaudot poche a été attribué à Olivier Rony pour sa biographie du comédien Louis Jouvet, paru chez Folio en janvier dernier. Dans ce récit très documenté de la vie de l'artiste, le professeur de lettres évoque la carrière de directeur de théâtre et de comédien de Louis Jouvet, et analyse également le jeu d'un acteur qui s'est illustré dans une trentaine de films, dont plusieurs sont devenus des classiques : Knock, Drôle de drame, Hôtel du Nord ou encore Quai des Orfèvres.
En 2020, le jury avait sacré Eric Roussel pour Charles de Gaulle (Perrin).
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